François Boher

Perpignan, 10 septembre 1815
A Monsieur le Curé de la commune d’Estagel

Comme je passai rapidement, je ne pensai pas à vous donner les proportions de la rotonde que vous faites contruire dans votre église. Je m’empresse de vous écrire pour réparer cet oubli et pour vous mettre à même de faire les choses selon les règles établies.
Je vous conseille donc de préférer la forme ronde à celle octogone ou ovale pour votre Camaril ; et dès que vous avez déterminé la grandeur, par rapport au jour et à l’enfoncement nécessaire, vous donnerez à la hauteur de la rotonde, le double de son diamètre : de sorte que si celui-ci a neuf pieds, par exemple, vous en conserverez 18 depuis le plancher, jusqu’au sommet de la coupole.
Il faut vous renfermer strictement  dans ces proportions. Dans le cas ou vous fussiez obligé de les franchir, ou de vous en écarter, mieux vaudra vous élever que vous abaisser, parce que, en suivant ce premier principe, vous obtenez de la noblesse, et c’est exactement ce qu’on doit rechercher dans ces sortes de constructions. Cependant il convient mieux de suivre ce que j’ai indiqué. ce que vous ne pourrez point faire à l’égard de l’ouverture;ou portique qui se trouve entre les colonnes; parceque la largeur est déjà déterminée. Vous serez forcé de donner toute l’élévation pour q ue le groupe soit complètement vu —- ,la disposition de l’autel vous mettra dans l’obligation de donner à la hauteur de cette ouverture plus du double de sa largeur. Je dois encore vous conseiller de tenir parfaitement uni l’intérieur de la rotonde, je veux dire, de ne point y faire aucune corniche ni pilastre. parce que, autrement, vous ne pourriez pas faire peindre cet intérieur en forme de gloire enrichie d’anges jouant des instruments, chantant et tenant des emblèmes ; ainsi que je me propose de le réaliser à l’autel de la Réal à Perpignan.
Je vous invite très fort, à ne pas vous écarter de cette voie si vous voulez obtenir une illusion complète et faire troner souverainement le groupe d ‘un artiste dont je sais —- les  talents. Dans le cas que vous preniez ce parti, demandez aux maçons de faire l’enduit uniment et solidement ——- et de mortier batard composé de platre et de mortier ordinaire. Ce mélange vaut beaucoup mieux que le plâtre seul, parcequ’il résiste à l’humidité et peut durer des siècles.
Je termine en vous avertissant qu’il faut faire assez grande l’overture par ou doit rentrer le jour, afin que l’intérieur de la rotonde et le groupe soient suffisemment éclairés, plus la lumière est vive plus l’effet en est ______ .Il faut pourtant des bornes en toutes choses. Il est indifférent pour la décoration, que cette ouverture soit ronde ou carré, cette dernière forme semble devoir mieux convenir, par rapport au vitrage.
C’est avec les sentiments d’une parfaite estime :et considération.
Votre bien dévoué serviteur. Boher

Après cette première lettre, le peintre Boher, écrit en réponse à un courrier de Mr. Pla Curé d’Estagel. Dans cette lettre le peintre indique la marche a suivre pour préparer le travail et faire les enduits. Il écrit aussi : « Il sera remarquable aux yeux de la postérité, et vous devez vous applaudir, Mr le Curé, ainsi que tous ceux qui vous ont secondé, d’avoir eu l’esprit assez noble pour élever dans la commune d’Estagel, un monument d’art d’une telle importance, puisque ce sera le résultat des efforts de deux artistes qui ne comptent point de rivaux depuis Madrid jusqu’à la capitale de la France. »

Il note aussi dans cette lettre qu’il connait bien le sculpteur Espagnol et se targue d’une franche amitié.

Dans une nouvelle lettre du 21 novembre 1815, il donne à l’abbé Pla ses dernière instructions concernant la préparation des enduits et des sous couches de peintures.

Le 18 janvier 1816 , il écrit de nouveau, pour informer l’abbé Pla qu’il faut prendre rapidement une décision, car il va être nommé à la tête d’une école à Perpignan regroupant dessin et architecture, et aussi une commande d’un grand tableau.